La décadanse

𝐃𝐄𝐔𝐗 𝐅𝐎𝐈𝐒 | «𝐕𝐢𝐭𝐞, 𝐙𝐚𝐧𝐳𝐢𝐛𝐚𝐫», 𝐌𝐨𝐬𝐬𝐞𝐭 𝐞𝐭 𝐚𝐮𝐭𝐫𝐞𝐬 #𝟒

Spoutnik

«𝐕𝐢𝐭𝐞, 𝐙𝐚𝐧𝐳𝐢𝐛𝐚𝐫», 𝐌𝐨𝐬𝐬𝐞𝐭 𝐞𝐭 𝐚𝐮𝐭𝐫𝐞𝐬 #𝟒

En collaboration avec le Mamco, dans le cadre de l’exposition Olivier Mosset

𝐃𝐄𝐔𝐗 𝐅𝐎𝐈𝐒 | 𝐉𝐚𝐜𝐤𝐢𝐞 𝐑𝐚𝐲𝐧𝐚𝐥 | 𝟏𝟗𝟔𝟗 | 𝐅𝐫𝐚𝐧𝐜𝐞 | 𝟏𝟔𝐦𝐦 | 𝟔𝟕′
A l’occasion de la réouverture du Spoutnik en septembre dernier, la réalisatrice Jackie Raynal est venue présenter HOTEL NEW YORK, film retraçant ses premières expériences au coeur de l’underground New Yorkais des années septante. Quelques années plus tôt, Jackie oeuvrait à Paris, au sein du groupe Zanzibar, qu’on peut considérer comme un autre foyer de la nébuleuse underground propre à cette période. Encouragée et financée par Sylvina Boissonas, alors mécène de tous les films Zanzibar, Jackie réalise Deux fois en 68. Le titre du film renvoie à son histoire de production: le budget alloué au film correspondant à de quoi tourner deux fois des scènes en 35mm. Et renvoie également à un désir de la cinéaste: contrarier la forme-conte, il était deux fois et non une fois. Selon Adrian Martin, on peut voir dans ce film une nouvelle version d’Alice au pays des merveilles dans lequel une femme connaît une métamorphose perpétuelle, au cours de laquelle elle devient enfant. Elle entre dans ce rituel auto-érotique qui s’auto-pérpétue, non par des drogues hallucinogènes et autres accesoires dionysiens mais par les ponts de la narration, de la performance, du théâtre: les masques et les mouvements de l’artifice. Si le film accorde une part importante aux puissances de l’imaginaire, le rêve se dissipe néanmoins par pointe pour laisser place à une déconstruction sauvage et agressive du cinéma d’exploitation dominant. En témoigne cette scènes où Jackie nous fixe alors même qu’elle urine.

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Un mot d’abord – la vitesse – pour tenter de rassembler les sept films de ce programme. Car chacun d’eux est l’expression d’un geste fulgurant, pulsion de vie pour disparaître ensuite. 1967-1973, l’expérience Zanzibar: des jeunes dandy enragé.e..s, réuni.e.s par un même désir de révolution aussi bien intérieure qu’extérieure, font une série de films où il est question de se “se perdre dans l’extase.” Cela dure quelques années seulement et ça ne pouvait pas durer plus. Le temps d’une jeunesse qui dérive dans les rues et vit l’imminence de mai 68 autant que son testament. “Seule issue: se tendre vers le recoin de la perte. Seule vitesse: la lumière” dit une voix off dans Détruisez-vous. Le temps aussi de Vite: film comme une pure déclaration de guerre à la lenteur. Ce combat n’est qu’une facette d’une lutte plus globale. La cible? Tout ce que le cinéma de consommation fait habituellement: solidifier les identités, produire des mythes, faire primer la narration sur tout le reste. Ainsi, Deux fois de Jackie Raynal s’ouvre sur cette annonce: “Ce soir ce sera la fin de la signification”. S’ensuit un film magnifique, “ciselage moderne et féministe du cinéma dominant et nouvelle version d’Alice aux pays des merveilles” pour reprendre les termes d’Adrian Martin.

La fulgurance de Zanzibar trouve des résonances ailleurs. Aussi à la veille de mai 68, Etienne O’Leary, proche de Zanzibar, compose des morceaux psychédéliques qu’il associe à l’agitation des rues de Paris, Lausanne, Londres. Des films-trips qui ouvrent des portes à Pierre Clementi, auteur de deux brûlots poétiques trempés d’acide. (Visa de Censure N°X et La révolution n’est qu’un début). Le sublime Clementi est aussi le corps fétiche des films Zanzibar et l’acteur d’un film rare, Wheels of Ashes, réalisé par un New Yorkais échoué dans les rues de Paris en 67. Là encore, l’élan vital voisine avec l’attrait du néant. S’y croisent deux jeunes mendiant.e.s christiques, en quête d’intensité et de paradis artificiels. “On me dit que je m’éloigne de la réalité, la seule que je connaisse c’est le chaos.”

Parcourir ces sept films, c’est se rendre compte qu’entre les deux pôles de la contre-culture (New York, Paris), la limite est poreuse, que ces deux mondes géographiquement lointains convergent vers une idée de pop-culture: beauté, acide, utopie, mysticisme et la musique en toile de fond. En 1973, la voix de Nico, du Velvet Underground fait vibrer le désert du Nouveau Mexique dans La cicatrice intérieure, dernier film-zanzibar réalisé par Philippe Garrel. Ici encore se devine la possibilité d’une communauté utopique en même temps que la détresse d’une génération.

Saut dans le temps enfin, entre 1979 et 1980, dans les clubs new yorkais. Il est à nouveau question de la jeunesse, au lendemain de Warhol, de la Factory et du Velvet Underground. Des musicien.e.s, des artistes et des cinéastes passent tant derrière la caméra que devant. C’est le moment No Wave et ça donne entre autres ces deux films, Underground USA et Downtown 81. On y trouve Basquiat, ses errances, son amour du graffiti sur les murs de Manhattan. On y contemple aussi toute une faune, aussi généreuse qu’inquiète, aussi flamboyante que prête, en direct, à se consumer.

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𝐈𝐧𝐟𝐨𝐬 𝐩𝐫𝐚𝐭𝐢𝐪𝐮𝐞𝐬 :

𝐎𝐮𝐯𝐞𝐫𝐭𝐮𝐫𝐞 𝐝𝐞𝐬 𝐩𝐨𝐫𝐭𝐞𝐬 𝟐𝟎𝐡𝟎𝟎. 𝐏𝐫𝐨𝐣𝐞𝐜𝐭𝐢𝐨𝐧 𝟐𝟎𝐡𝟑𝟎.

𝐉𝐚𝐮𝐠𝐞 𝐝𝐞 𝐥𝐚 𝐬𝐚𝐥𝐥𝐞 𝐫𝐞́𝐝𝐮𝐢𝐭𝐞 𝐚̀ 𝟒𝟎 𝐩𝐥𝐚𝐜𝐞𝐬. 𝐏𝐚𝐬 𝐝𝐞 𝐫𝐞́𝐬𝐞𝐫𝐯𝐚𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐩𝐨𝐬𝐬𝐢𝐛𝐥𝐞.

𝐏𝐨𝐫𝐭 𝐝𝐮 𝐦𝐚𝐬𝐪𝐮𝐞 𝐨𝐛𝐥𝐢𝐠𝐚𝐭𝐨𝐢𝐫𝐞 𝐝𝐚𝐧𝐬 𝐥𝐞𝐬 𝐩𝐚𝐫𝐭𝐢𝐞𝐬 𝐜𝐨𝐦𝐦𝐮𝐧𝐞𝐬 𝐝𝐮 𝐜𝐢𝐧𝐞́𝐦𝐚 (𝐜𝐚𝐢𝐬𝐬𝐞, 𝐡𝐚𝐥𝐥, 𝐭𝐨𝐢𝐥𝐞𝐭𝐭𝐞𝐬) 𝐞𝐭 𝐩𝐞𝐧𝐝𝐚𝐧𝐭 𝐥𝐚 𝐬𝐞́𝐚𝐧𝐜𝐞.

𝐍𝐨𝐮𝐬 𝐯𝐨𝐮𝐬 𝐩𝐫𝐢𝐨𝐧𝐬 𝐞́𝐠𝐚𝐥𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐝𝐞 𝐧𝐨𝐮𝐬 𝐥𝐚𝐢𝐬𝐬𝐞𝐫 𝐯𝐨𝐬 𝐜𝐨𝐨𝐫𝐝𝐨𝐧𝐧𝐞́𝐞𝐬 (𝐧𝐨𝐦, 𝐩𝐫𝐞́𝐧𝐨𝐦, 𝐧𝐮𝐦𝐞́𝐫𝐨 𝐝𝐞 𝐭𝐞́𝐥𝐞́𝐩𝐡𝐨𝐧𝐞, 𝐚𝐝𝐫𝐞𝐬𝐬𝐞 𝐞-𝐦𝐚𝐢𝐥).
20:30 – 22:30
Prix Spoutnik
Signaler une erreur Ajouté par Cinéma Spoutnik le 31 mai 2021