La décadanse

Virginie Morillo - Idolomantis Diabolica

Pas de mots pour résumer le tragique événement qui s’est déroulé le jour de la St Valentin dans mon atelier à l’usine Lucifer-Parker.

Toute l’exposition est partie dans les flammes. Il reste de ce sinistre, un cimetière de pièces orphelines et amputées.
Pour une artiste qui aime la sobriété du NOIR, et bien c’est l’obscurité du cœur que j’ai reçue.

Courageusement, je vais titiller le Diable et lui montrer que je n’abandonnerai pas le jeu. L’exposition se voulait lumineuse, elle sera dangereuse, fragile et dramatique.

Avec la solidarité de mes amis, je me relève des cendres pour vous présenter une exposition qui tient grâce au courage et par cette volonté de créer des étincelles.

L’ensemble du travail est ma vision actuelle d’horreur et de séduction qui hantent mes rêves.

BABY, LIGHT MY FIRE

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Virginie Morillo
Idolomantis Diabolica

Avec le soutien de l’ Office cantonal de la culture et du sport - DSC et du Département de la culture et du sport de la Ville de Genève



Une grande fille au teint pâle, aux cheveux sombres, à l’allure de mannequin, c’est ainsi que l’on me décrivait au début de ma carrière dans mes alter-egos que je crée volontairement comme des poupées utilisées pour les crash-tests.

L’exposition commence par un autoportrait polaroïd de moi-même dévorant un steak cru intitulé La vengeance est un plat qui se mange froid.

Plus besoin de décapiter, dévorer, terroriser, empoisonner, je suis partie dompter des Cavaliers des Ombres vêtus de cuir et d’acier. Aller au Mexique rencontrer un gang de bikers surnommé Los Legionaros, et les faire parader avec des drapeaux au milieu d’un champ d’agaves, est parti d’un fantasme.

Un véritable ballet de fer et de cuir chorégraphié avec soin. On peut lire sur ces drapeaux de soie des punchlines comme : CRAME - LET’S GET LOST - TREMBLE - ROADS OF EXCESS. Des brûlures de pots d’échappement viennent orner chaque drapeau. L’aventure mexicaine et la rencontre avec Los Legionaros a été comme un exutoire à la cruauté exprimée dans mes pièces.

Longtemps, j’ai crié sur scène « 1-2-3, je jouis » en lançant ma petite culotte au public. Comme une sorte de réplique féministe à un célèbre groupe de rap français. J’ai peint LICK ME en chocolat sur les murs des Beaux-Arts, j’ai dissimulé des bouteilles d’acide derrière mes sculptures enfantines, j’ai fabriqué des moulins à vent tranchant habillés de lame de rasoir, mais je n’avais encore jamais été léchée comme un animal par un chauffeur de taxi au beau milieu du Caire. Pas loin de la place Tahir, mes poignets ont été léchés par un jeune chauffeur de taxi qui, excité par le fait que j’apprécie la musique qui passait dans l’auto radio, a soudain saisi de force mes poignets pour leur infliger un coup de langue. Les stigmates visqueux dans ce grand chaos doré que représente Le Caire sont les sujets de mon exposition.

C’est d’ailleurs avec la qualification d’artiste tout terrain que j’ai été nominée pour aller suivre cette résidence en Égypte.

Le refrain de l’exposition est donc une invitation envoutante et répulsive à ce nouveau chapitre dans ma carrière d’artiste conteuse. Inspiré par l’acte cannibal de la mante religieuse, l’anthropologue Malek Chebel présente une relation manternelle entre la mère et son fils dans les pays arabes. Une sorte de survalorisation du petit enfant mâle qui reste dans une forme d’infantilisme persistant égoïste et agressif envers ses sœurs, sa femme, les filles, ses amantes. La femme n’est reconnue qu’après avoir donné naissance à un enfant mâle.

Les sociétés patriarcales bédouines, persanes et maghrébines évaluent le potentiel fécondateur de la femme au nombre de ses enfants mâles. La mère est donc comme une mante religieuse, castratrice et manipulatrice aux yeux de l’auteur dans les pays arabes.

Mes marionnettes ne sont pas une représentation de la mère manternelle mais plutôt de deux étrangers, deux êtres asexués pénétrant dans une nouvelle dimension. Elles m’ont permis de diriger mon film et les jeunes acteurs beaucoup plus facilement. N’ayant reçu aucune autorisation pour filmer, je devais trouver un moyen de tourner clandestinement et illégalement mon film.

L’histoire se déroule comme un conte qui suggère la découverte d’un trésor dont on ne sait que faire ou la rencontre matérialisée avec l’inconnu.

Vues comme des messagères bienfaisantes dans l’Ancienne Égypte, les mantes guidaient les âmes jusqu’au paradis. Ils les voyaient comme des êtres aux pouvoirs surnaturels.

Dans ce chaos de cette mégapole égyptienne rythmée par la voix de l’imam, un conte nouveau prendra place.
14:00 – 18:00
entrée libre
Signaler une erreur Ajouté par Halle Nord - Art en Île le 9 mars 2020