La décadanse

Hani Benyezzar / egyptian cineaste / présente 3 mini films + restauration

Hadi Benyezzar vous invites à partager un moment avec lui il va présenter ses deux films amateurs. Dans le cadre des diffusions comme à la maison un repas végétarien aux saveurs nord africaines sera préparer à prix libre.

Film 1 : Il êtait une fois le squat de l'avenir (58 min)
Film 2 : La vie de rêve 8"min

C'était une maison jaune, dont l’entrée était barrée du mantra «Entre qui veut, sort qui peut». Mohammed El Hadi Benyezzar, «Hadi» pour les intimes, est l’un des derniers occupants du «squat de l’Avenir», en face de la Bibliothèque municipale des Eaux-Vives.

La Ville de Genève et plusieurs associations se sont battues jusqu’au Tribunal fédéral pour sauver cette bâtisse du XIXe siècle, en vain: elle a été rasée, ainsi que ses voisines, pour construire un immeuble de cinq étages. «Hadi» a filmé les derniers instants d’une époque maintenant révolue.

Il y avait une super-ambiance

«J’ai connu cet endroit en 2010, un peu par hasard, nous explique ce frigoriste de 35 ans. Je passais dans le quartier et j’ai vu qu’il y avait des projections de films tous les mercredis. J’y suis allé très souvent. Il y avait une super-ambiance», dit-il avec les yeux qui brillent à l’évocation de ce souvenir.

De son côté, il loue une petite chambre à Meyrin pour 750 francs. «C’était trop cher, je ne m’en sortais pas, comme tout le monde. Mes amis du squat m’ont proposé une chambre.» Il emménage en 2012, pour la modique somme de 100 francs, pour les charges.

«J’étais super-content. Il y avait beaucoup de musiciens là-bas, comme le groupe Gypson Five. On se réunissait tous une fois par semaine. On avait un sleeping (ndlr: une chambre d’amis) pour les gens de passage. Ils arrivaient et repartaient. Il y avait des Slovaques, des Français, des Canadiens…»

La décision de justice tombe

Jusqu’au jour où la décision de justice tombe et leur impose un délai de six mois pour quitter les lieux. «C’était une grosse déception, c’était la fin. Les plus anciens en avaient marre de cette vie, de ne jamais savoir combien de temps il leur resterait. On avait un ami à l’extérieur, Yann, qui en apprenant cela est venu s’installer direct, pour vivre les six derniers mois de l’aventure.»

Un ami prête une caméra à «Hadi» pour l’occasion. «A la base, c’était juste pour garder des souvenirs. Je ne pensais pas en faire un film.» A l’aide de ce petit caméscope dont la batterie ne marche plus, et qu’il faut maintenir sans cesse branché sur secteur, «Hadi» grave des moments au hasard. «Je n’ai pas fait le travail d’un journaliste en reportage, j’ai tourné à l’instinct. Il y a aussi des moments très forts que j’ai vécus et que je n’ai pas filmés. Certains n’avaient pas très envie d’être filmés, j’ai filmé quand même», raconte-t-il en souriant.

On visionne des jams, des slams, des concerts improvisés dans le jardin. La musique du monde des Gypson Five est omniprésente dans ce document sans voix off. On assiste à une discussion pour échelonner le paiement des factures avec Jonas, alias «le comptable», un chapeau toujours vissé sur la tête. Une autre sur le chat de la maisonnée, Quito, impassiblement perché sur son toit.

De la musique, pas de la drogue

Une jeune femme prend son café le matin, une autre fait des doigts d’honneur à la caméra, un jeune homme tente un numéro de jonglage. Un groupe est attablé autour de quelques verres de bière et de miettes de chips posées à même la table pour une soirée festive. On rit quand une fille qui essaie de dormir vient mettre fin à la fête tardive de ses petits camarades.

«C’est ça une maison collective, commente «Hadi». Vous voyez, ce n’est pas de la drogue tout le temps comme ce que certains imaginent.» Le dernier jour, en novembre 2014, a-t-il pleuré? «Non! Bizarrement, je n’étais pas triste mais super-content, enfin disons excité, car j’ai réussi à filmer les policiers en cachette depuis la fenêtre!» Le squat, c’est terminé depuis plus d’un an, mais pas vraiment dans sa tête, «car j’étais encore en train de travailler sur le montage du film. J’ai fait le deuil de cet endroit seulement le jour où j’ai organisé la première projection privée de mon film, avec tous les gens qui sont dedans.»

L’avant-première en public aura lieu le 4 mars, une date symbolique pour «Hadi», qui est arrivé à Genève en provenance d’Algérie un 4 mars 2006. Si les retours sont bons, il aimerait proposer son film à des festivals. «C’est trop tard pour Visions du Réel à Nyon», regrette-t-il.

«Il était une fois le squat de l’Avenir»
18:20 – 20:30
LIBRE
Signaler une erreur Ajouté par Herr Liebe le 6 mai 2018