La décadanse

Dr Sadd / f / sitar rock (vernissage)

La Madrague – Docteur Sadd – Avril 2017
Depuis la Tragédie païenne, Dr Sadd construit sa légende personnelle en même temps qu'il continue d'explorer les mythes et les modes lointains. Il se dépeint non sans humour comme un Castaneda de juke-box, l'aventurier d'un rock de ballade désabusé.
Avec la Madrague, dont le nom évoque toute la douceur sereine de la Côte d'Azur, le divin docteur nous livre un imaginaire captif de ses motifs obsessionnels et de son lyrisme, qui tel le dernier Beethoven, se cogne la tête contre les barreaux de la tonalité. Ses expérimentations synthétiques et sérielles n'ont probablement pas atteint la maturité qui les laisserait s'intégrer au mainstream de sa musique.
Alors en attendant, le Dr Sadd surfe au coeur d’un Occident pressé. Par chance, il a vécu en Inde, et retrouve avec le sitar - au moins depuis l'Indian Psycho Pop (2012) - un peu de ses propres racines, cosmopolitaines sans ostentation. Et Sadd joue ici avec sa propre thématique, car si le précédent album s'appelle Tragédie païenne sans développer de thème typiquement tragique et où le paganisme était à investiguer, c'est dans cet opus, la Madrague, qu'apparaît avec Cassandre, le thème central de la tragédie, païenne qui plus est. A l'ère du téléchargement de musique atomisée, on ressent une certaine gratitude à voir une oeuvre se créer en disant quelque chose sur plus de 2 minutes 30, à une autre échelle, celle de l'album, et même de l'oeuvre.
Depuis le Rade incertain (2014), on s’était habitué au ton blasé qui sied à cette musique en masquant ainsi l’abus dont elle souffre. Car le rock 'n roll est péremptoire, comme cette assertion même, donc oppressif. Il trouve sa libération dans le retour de baton libérateur qu’il exerce sur l’auditeur, en gagnant toujours déjà le défi du consensus. Le même assentiment refusé naturellement à l’ordre établi, facilement subi. Saisissant l'ironie de la contestation en demie feinte, les intonations protocolaires disséminées dans le texte sont devenues une marque de la fabrique poétique de Sadd. Les références musicales implicites témoignent de cette désillusion collective et du repli subjectif. Les Beatles, Gainsbourg bien sûr, mais aussi Barbara peut-être et plus près de nous Julie Armanet et Arnaud Fleurent Didier.
www.youtube.com
18:31 – 19:32
libre
Signaler une erreur Ajouté par Herr Liebe le 25 avril 2018